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L'invraisemblable Plan Beaufre


Le Général Navarre voulait


« des hélicoptères d'assaut »














Il n'est pas question ici de venir redonner en détail ce que furent le «Plan Beaufre»
et le «Plan 100» du Général Navarre.


Le Général MARTINI les a exposés dans BBM 88 ainsi que dans son mémoire
de thèse, pages 101 à 111.



On peut essayer de faire le résumé suivant :


La guerre d'Indochine fait naître un intérêt général à propos de l'hélicoptère,
que ce soit tout d'abord pour l'évacuation des blessés et la récupération des pilotes,
puis en se rendant compte que l'hélicoptère peut parfaitement servir à des fins opérationnelles.





Un groupe de travail sera constitué, présidé par le Général Beaufre :

« ..... Dans une « note sur l'emploi des hélicoptères en guerre coloniale » le général 
envisage l'engagement simultané et coordonné d'appareils de commandement, 
de reconnaissance et de transport appuyés par des appareils armés.
L'emploi de ces derniers permet de « clouer au sol et de disperser des colonnes surprises,
de couvrir les débarquements ou les rembarquements en hélicoptères.
L'appareil convenant pour ce genre de mission est la jeep aérienne employée en patrouilles 
de plusieurs appareils se couvrant mutuellement, les uns attaquant à la mitrailleuse, 
les autres à la grenade .....» (Général MARTINI, page 101)


Le Général Beaufre va préconiser la mise en place de 100 appareils légers et 350 à 400 appareils lourds.






En mai 1953, le Général NAVARRE remplace le Général SALAN. Compte tenu des « dimensions»
du plan Beaufre, il va établir en septembre 1953 un plan dit «Plan 100» qui consiste à disposer
en 1954 de 25 hélicoptères légers et de trois compagnies de 21 hélicoptères moyens.


Ce plan n'est pas plus réaliste et les Américains, le nerf de la guerre, dans le vrai sens du terme,
sont très sceptiques sur les capacités françaises et, de plus, ne peuvent fournir.









Il est finalement décidé, en mars 1954 (voir Général MARTINI, page 109) de la mise en place
de 50 hélicoptères pour 1954, et de 50 autres en 1955. Ce qui ne sera pas plus réalisé,
évidemment peut-on dire, nous verrons les raisons.


On aboutira finalement au compromis, toujours relaté par le Général MARTINI, 
de la conjonction des forces de l'armée de terre et de l'armée de l'air.
Ceci devait arriver à la situation, qui a été racontée en détail, d'une force d'hélicoptères
entièrement dominée et gérée par l'armée de l'air.


















Pourquoi invraisemblable ?



La réponse est simple :


Il n'y avait : ni l'argent (les Américains finançaient 80 %)

ni les appareils

ni le personnel



Le personnel ... le problème primordial. Si les Généraux BEAUFRE et NAVARRE avaient daigné 
se renseigner auprès des seuls qui connaissaient réellement la question ... Mais le Colonel 
commandant l'ALOA était un trop petit personnage, de plus au caractère impossible,
quant à son adjoint, le Chef d'Escadron chargé du recrutement et de la formation des pilotes
et mécaniciens, n'en parlons pas ...


Pour mémoire, la lettre du 25 septembre 1953 du Commandant RAZY : possibilités maximales pour le 1er juillet 54 : 
10 pilotes Hiller, 19 pilotes S 55, et, au total, au 1er janvier 1955 toujours 10 pilotes Hiller et 27 pilotes S 55.


Or, on veut mettre en ligne (voir pages 110 et 111 du mémoire du Général MARTINI) 
3 fois 17 S 55, soit 102 pilotes, et 17 Hiller, donc 17 pilotes, total 119 pilotes et on en prévoit 66+60 = 126 ...
Les malades, les blessés, les absents, les permissionnaires sont où ?


Le reste à l'avenant. Combien de Hiller et de S 55 livrés ? Entre 1950 et fin 1954, 15 Hiller,
9 Westland S51 et 18 S 55, total 42, dont 12 présents en mai 1953, annonce le Colonel SANTINI.
Là dessus, combien de casse et d'indisponibilités ?
Sans compter les quelques S 55 en caisses que le CE RAZY réussira à sauver des griffes
de l'armée de l'air, et qui repartiront directement en Algérie pour le grand bien du GH 2.









Il est bien certain que l'on peut toujours rêver, et imaginer, comme cela est écrit, 
avec '' ceux qui ont inventé l'ALAT ''
« que l'introduction d'hélicoptères en grand nombre, 
un an plus tôt, aurait probablement modifié les cours des évènements »
.



On peut aussi phantasmer et penser que si nous avions eu des Tigres et des NH 90 en Indochine,
de même que des Leclerc en 40, nous aurions effectivement modifié le cours des évènements ...

















Les stratèges de l'armée de l'air devaient doucement ricaner en lisant le « rapport Beaufre » 
préconisant des « jeeps aériennes armées », car ils savaient bien que cela n'existerait pas avant ...
un certain temps. Par contre, ils souriaient beaucoup moins quand l'ALOA commençait à réclamer,
dès 1953, le POTEZ 75 « tueur de chars » et appareil d'appui-feu rapproché 
(voir la lettre du 6 avril 1954 du Commandant BERTHELOT, mon père). Cet avion d'observation 
et d'appui-feu multiple volait depuis mai 1953, en faisant preuve de qualités assez sensationnelles.


Seule l'obstination que mettra l'armée de l'air à contrecarrer les projets de l'ALAT sur cet appareil,
fera qu'il ne sera jamais en service.



Eh oui ! Un avion, car on savait, à cette époque, faire des avions, mais pas encore des hèlicoptères.
On savait faire des avions destinés à un usage bien précis et le POTEZ 75 avait été développé,
à titre privé, à usage d'observation et anti-char en employant le missile filo-guidé SS10.
Bien que l'ALAT en 1953 n'existât pas encore officiellement, il était destiné, dans l'esprit 
de ces concepteurs à l'armée de terre et fut, en partie, essayé par elle. Il faut lire 
les n° 216-217-218 du Fana de l'Aviation, mais aussi, plus loin, ce qu'en disait le Général LEJAY
pour connaître son histoire.
Et ce ne sera pas le seul avion de ce type qui intéressera l'ALAT.







Combien de temps faudra-t-il attendre pour avoir un véritable hélicoptère de combat-d'attaque-d'assault -
je ne sais vraiment pas comment il faut dire pour contenter les uns et les autres ? 
Le premier – véritable – sera le Bell Huey Cobra en 1967. Les Alouette II et III, les Gazelle
sont des appareils civils sur lesquels on a monté un armement sans qu'ils soient du tout destinés 
et surtout aptes à cet usage.Le premier appareil véritablement étudié pour les besoins de l'ALAT
sera le SA330 Puma. Le programme du Tigre sera lancé en 1979 : 10 ans de tergiversations pour 
qu'il soit véritablement démarré et encore 15 années d'hésitations et d'essais pour avoir,
enfin les premiers appareils en 2005, soit 50 ans après qu'ils aient été « inventés ».






Quant à suivre le Général MARTINI, page 113, quand il dit des « ..... responsables du GFHATI ..... 
élargissants leurs réflexions, (ils) mettent en évidence le besoin, dans toutes les situations, 
d'un appui-feu intégré aux forces terrestres et à leur disposition immédiate, capable de délivrer
des feux diversifiés en particulier antichar ..... »
c'est vouloir volontairement méconnaître 
l'histoire de l'ALOA d'une part, et, d'autre part, encore une fois, leur attribuer des découvertes
et des inventions que d'autres ont faites avant eux.












Car l'ALOA était une ALOA de combat, n'en déplaise au Colonel PUY-MONTBRUN.






























Dessins Fana de l'Aviation
























Lettre du Général SALAN

au Ministre des Etats-Associés
























Lettre du Général BEAUFRE

au Général NAVARRE Cdt en Indochine



















Lettre du Général GAMBIEZ Cdt l'EMIFT

au Général BEAUFRE














Ou comment se font les choses ... car, bien sûr, l'ALOA ne pouvait être d'aucune aide dans ces réflexions
et décisions de grands chefs, à part, évidemment, et comme on l'a vu, pour assurer l'intendance,
car elle seule y connaissait quelque chose.


Quant à l'arrivée du Capitaine CRESPIN, elle était, en réalité, prévue depuis bien avant le 16 octobre 1953, 
étant donné que ce dernier était, depuis deux mois, en principe, en stage chez Hélicop'Air.















Lettre du Général NAVARRE Cdt en Indochine

au Général BEAUFRE




















Lettre du Général BEAUFRE

au Général GAMBIEZ Chef de l'EMIFT





















Fiche de l'EMIFT

commandé par le Général GAMBIEZ











Il est très curieux de constater que, dans cette fiche datant du 22 mai 1954, on ne fasse
aucune mention du GFHATI qui, théoriquement, existait depuis le 16 du mois précédent.

Doit-on en déduire que la véritable date de naissance du GFHATI sera bien postérieure,
ce qui renforcerait son caractère très « théorique » ?







En tous cas le 5ème alinéa de cette note «...Mais l'attitude réservée du S.E.F.A. - Air... »
explique et renforce singulièrement à postériori les réticences et le refus de mon père 
de prendre en compte les personnels des hélicoptères « Terre » avec une mise en oeuvre
entièrement contrôlée par l'Armée de l'Air.




























Un grave problème de sémantique





On vient de le voir : dans sa lettre, datant du 22 octobre 1953, au Général BEAUFRE, 
Commandant le groupe d'étude sur les hélicoptères, le Général NAVARRE, 
Commandant en Chef en Indochine, attend des Américains qu'ils poursuivent 
sur ce territoire leur expérimentation
« d'hélicoptères d'assaut ».


C'est donc, apparemment, le Général NAVARRE qui a le premier proposé ce terme, 
pour le moins tout à fait novateur. A-t-il été refusé avec indignation, avec mépris, avec irritation
par les Etats-Majors, je ne sais.


Par contre, le terme « hélicoptère de combat », tout aussi novateur, a subi toutes ces injures.
Il a été inventé, nous dit-on (voir BBM 100 page 17), par le Commandant CRESPIN et 
le Capitaine PUY-MONTBRUN en mars 1955. Soit un an et demi après.


Les deux termes auraient-ils le même sens ?



ASSAUT : le Grand Larousse Encyclopédique nous dit : attaque faite dans le dessein d'emporter
de vive force une position ennemie ..... attaque violente ..... aviation d'assaut, formations aériennes
spécialisées dans l'intervention au profit direct des troupes terrestres .....char d'assaut, voir char de combat .....


COMBAT : lutte engagée pour attaquer ou se défendre par les armes ..... Auj. action militaire offensive
ou défensive limitée dans l'espace et dans le temps : Un combat aérien, naval .....



Si je comprends bien un assaut est une attaque dans un but précis et un combat
une lutte engagée pour attaquer. D'autre part, pour réaliser un assaut, il faut bien combattre ?



C'est là où l'on voit qu'il faudrait vraiment l'exégèse d'un spécialiste.



Mais alors, si jamais ces deux termes sont équivalents, la paternité présumée 
en reviendrait au Général NAVARRE, et il conviendrait, dans ce cas, 
de rendre à NAVARRE ce qui est à NAVARRE.




















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